Sciences sociales - Sociologie des sciences
L’Antarctique est un continent entièrement consacré à la recherche scientifique internationale depuis la signature du traité qui en assure la gouvernance. Si les terres australes font aujourd’hui l’objet d’un nombre considérable de missions de terrain et mobilisent des chercheurs du monde entier, très peu de travaux y décrivent concrètement les conditions de production et de diffusion du savoir scientifique. Le continent antarctique représente pourtant un territoire emblématique de la recherche contemporaine, à la croisée des découvertes scientifiques, des relations internationales et des politiques environnementales (Aykut and Dahan 2015; Elzinga 1993). Devenu l’un des terrains de recherche les plus emblématiques de la planète à l’aune de l’étude du changement climatique, c’est également l’un des plus menacés (Gaudin 2007a; Gaudin 2007b).
Comment les chercheurs travaillent-ils dans des conditions extrêmes et un environnement menacé ?
Réalisation :
Le projet de recherche comporte deux volets principaux :
[1] Un premier consiste à documenter et analyser l’activité scientifique qui se déroule à l’échelle d’une base de la péninsule antarctique au sein de laquelle nous pourrons séjourner durant l’été austral. Présentée comme un modèle de coopération internationale, la nature des activités scientifiques menées en Antarctique a été profondément transformée avec l’émergence de la crise climatique comme problème politique international (Howkins 2011; Grevsmühl 2019). A l’avant-poste des études sur le changement climatique, elles font cependant l’objet de tensions croissantes relatives notamment à la renégociation à venir du Traité sur l’Antarctique. Il s’agit donc de comprendre comment l’activité scientifique s’y organise au concret en étant traversée par des enjeux diplomatiques, économiques et environnementaux, qui plus est dans des conditions extrêmes (Jouvenet 2016; O’Reilly 2017).
[2] Un second est de proposer une approche réflexive de l’expédition et des sciences de terrain. La possibilité de suivre au plus près l’ensemble des phases du projet, de sa préparation à la publication des résultats de recherche, offre une occasion unique de documenter un exemple d’expédition contemporaine (Faugère 2019). Antarctique 2.0°C apparaît par ailleurs comme un exemple de recherche interdisciplinaire, et invite à une réflexion sur les rapports entre sciences expérimentales et sociales, ainsi que sur leurs démarches de recherche (Prud’homme and Gingras 2015; Kohler 2002).
Les recherches s’effectueront selon la méthode ethnographique, qui permet d’appréhender des phénomènes sociaux à la fois dans leur durée et leur quotidienneté. Des entretiens auprès des principaux acteurs de l’enquête seront réalisés tout au long de l’expédition. Un travail d’archives et de documentation conséquent concernant la base scientifique sera également réalisé.
En collaboration avec :
Cédric Moreau de Bellaing - LIER-FYT – EHESS/ENS
Morgan Jouvenet - PRINTEMPS – CNRS/UVSQ